samedi 14 novembre 2009

L'examen d'accès aux centres de formation à la profession d'avocat

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En France, pour devenir avocat, les candidats à la profession doivent préalablement passer par une école de formation, appelée en province "Centre régional de formation à la profession d'avocat" (CRFPA) et à Paris, "Ecole de formation du Barreau" (EFB). Cette formation, qui se termine par l'obtention du CAPA (certificat d'aptitude à la profession d'avocat), lequel sanctionne une série d'examens et contrôles en fin de parcours, est aussi précédée par un examen d'accès, censé ne permettre qu'aux juristes ayant le niveau requis d'accéder à cette école.
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Cet examen, qui est bien une exception française, n'est pas un concours. C'est-à-dire qu'en théorie, l'admissibilité et l'admission ne sont pas déterminées par le rang mais par le niveau du candidat. En théorie, car il apparaît qu'en pratique, des dérives existent.
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Cet examen connaît une série d'injustices.
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D'abord, injustice au niveau de l'enseignement délivré par les universités qui organisent cet examen, par le truchement des Instituts d'études judiciaires (IEJ). Les candidats qui ont suivi tout le cursus au sein de l'université où ils présentent l'examen sont indéniablement favorisés par rapport aux outsiders, vu qu'ils connaissent les professeurs qui interrogent et notent et connaissant aussi leur façon de présenter leurs cours, leurs habitudes et marottes (car les examens sont conçus et corrigés par des avocats, des juges, mais aussi des professeurs de l'université où se déroule l'examen et ces derniers ont un rôle prépondérant dans l'évaluation des prestations et la conception des questions).
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Ensuite, injustice par l'existence d'écoles privées, qui offrent en complément un enseignement coûteux, lequel n'est pas accessible à tous. De plus, ces écoles privées ont souvent des rapports privilégiés avec les universités et plusieurs fois, des questions déjà analysées en profondeur dans ces écoles privées ont été posées à l'examen.
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On peut aussi constater de nombreuses aberrations dans la notation et le déroulement de l'examen.
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D'abord, une part importante de la note est accordée au soin de la copie, ce qui rend cet examen difficile d'accès aux personnes douées à l'oral et à l'écrit et ayant un profil bien adapté à la profession, mais handicapées par une vilaine écriture. Ce point est d'autant plus aberrant, qu'actuellement, l'écriture manuscrite est de moins en moins utilisée, que tous les documents sont rédigés à l'ordinateur. Même la prise de notes se fait fréquemment par ordinateur.
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Ensuite, cet examen reste excessivement scolaire et théorique, et demande de faire usage de méthodologies qui ne serviront jamais aux avocats (faire une dissertation ou même un commentaire d'arrêt par exemple, ne font pas partie du quotidien de l'avocat, à la différence du cas pratique, qui se rapproche davantage de la consultation d'avocat sans être tout à fait similaire).
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La notation reste assez hasardeuse, et il n'est pas rare de voir des copies afficher une double correction complètement incohérente (ce qui vaut largement la moyenne pour un correcteur, est quasi-nul pour un autre). Par ce problème, l'examen s'apparente à une sorte de tirage au sort. Pour atténuer ce problème, certains IEJ ont choisi de faire usage de triples corrections (non conformes au règlement de l'examen d'accès qui exige une double et non une triple correction). La délibération est aussi censée éviter ces écueils, mais alors cet examen devient un examen à la tête du client, où quelques professeurs décideront en définitive de l'admission ou non du candidat. Pour peu qu'un professeur ait une mauvaise opinion de vous, ou des influences négatives (ou l'inverse, que vous ayez du piston), votre sort est scellé et peut-être tout à fait injustement. Et dans ce cas, on ne peut dire que l'anonymat a été respecté à la notation.
L'évaluation est d'autant plus hasardeuse que beaucoup de corrections sont faites comparativement (en classant les copies) en dépit de l'absence de situation de concours et que certains correcteurs ne connaissent pas bien l'esprit ni les modalités de cet examen, le confondant souvent avec un concours. Beaucoup testent au Grand Oral les connaissances (or le Grand Oral n'est pas un examen de connaissances suivant l'arrêté du 11 septembre 2003 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de la formation professionnelle d'avocats.) et la culture générale (laquelle n'est pas non plus un des objectifs du Grand Oral suivant le même arrêté). Pour exemple, un professeur n'a pas à demander de définitions très pointues et complexes au Grand Oral, sachant qu'en plus, elles font l'objet de controverses et même de thèses.
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La surveillance est assez approximative et les toilettes demeurent un lieu privilégié de tricherie (consultation de téléphones, consultation de fiches dissimulées sur soi).
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Pour toutes ces raisons, je refuse personnellement de présenter cet examen, en dépit du fait que j'ai déjà suivi la prépartion donnée par un IEJ et que j'en ai déjà réussi tous les entraînements notés. Je ne présente que des épreuves que je suis sûre de réussir, je ne participe jamais à des tirages au sort.
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Cet examen, qui s'apparente pour certains à un tirage au sort, peut être contourné. Et même l'ensemble de la formation peut être contourné. Ainsi, certains professionnels comme les professeurs de droit, les huissiers de justice ou des membres du Conseil d'Etat peuvent directement s'inscrire comme avocat (sur dossier) à condition d'avoir exercé le nombre d'années requis leur activité. C'est la voie qu'ont choisie Dominique de Villepin et Frédéric Lefèbvre par exemple.
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